Henri Fantin-Latour, auteur de l’Hommage à Delacroix après la mort du peintre en 1863, réalisa une décennie plus tard cette œuvre d’après Femmes d’Alger dans leur intérieur (1834, Louvre), témoignant de la pérennité de son admiration pour son aîné. Le tableau de Delacroix, peint en 1834, venait alors d’entrer au Louvre, après son exposition au musée du Luxembourg.

Un hommage à Delacroix

A l’instar des peintres de sa génération désignés par Edmond Duranty comme les représentants d’une Nouvelle Peinture, Henri Fantin-Latour voua, tout jeune peintre, une vive admiration à l’œuvre d’Eugène Delacroix.

Quelques semaines seulement après le décès du peintre, le 13 août 1863, il s’émut du peu de célébrations que sa disparition avait suscitées. Il conçut très vite le projet d’un hommage à son aîné, auquel il souhaita associer ses amis artistes, peintres et graveurs – Edouard Manet, James Abbott Whistler, Alphonse Legros -, comme les critiques de la génération qui le précédait, Jules Husson dit Champfleury et Charles Baudelaire, fervent laudateur de Delacroix. Le grand tableau de 1864, ensuite acquis par Etienne Moreau-Nélaton qui le donna en 1906 au Louvre, a constitué depuis le modèle du tribut rendu par un artiste à l’un de ses prédécesseurs.

L’activité de copiste de Fantin-Latour

Fantin-Latour fut, dès les années 1850, un visiteur assidu des galeries du Louvre. Observateur fidèle de la tradition picturale, il y copia les œuvres de Titien, Poussin, Greuze, Guido Reni, Véronèse ou Géricault. Delacroix avait présenté au Salon de 1834 sa grande toile, Femmes d’Alger dans leur appartement, inspirée, selon lui, d’une visite qu’il put faire à Alger à l’intérieur d’un harem. Delacroix offrait là une vision renouvelée du thème de l’odalisque, à la taille d’une peinture d’histoire. L’œuvre fut acquise par l’Etat la même année et présentée au musée du Luxembourg. Elle rejoignit le Louvre en 1874 avec d’autres œuvres de Delacroix, dont La Liberté guidant le peuple.

Une copie fidèle

La belle interprétation de cette œuvre par Fantin-Latour fut réalisée peu de temps après l’entrée au Louvre du tableau initial, en 1875 ou en 1876. Bien que plus petite que l’œuvre originale – qui mesure près de deux mètres sur trois -, la toile est de belles dimensions, soulignant ainsi l’engagement du peintre. Très fidèle à la composition et au dessin de Delacroix comme à la gamme colorée choisie, elle témoigne de l’observation attentive du tableau. Seule la femme assise à gauche de la toile semble, par les traits de son visage, plus proche des modèles de Fantin-Latour que de ceux de Delacroix.

La présence de cette toile permet d’évoquer au sein du musée une des œuvres majeures de Delacroix, en lien avec les objets rapportés de son voyage au Maroc et au regard des estampes qu’il fit sur le même thème.

Bibliographie

Victoria Fantin-Latour, Catalogue de l’œuvre complète de Fantin-Latour, Paris : H. Floury, 1911, p. 81.