Ce jeune homme à l’expression un peu boudeuse, coiffé d’un bérett bleu, a longtemps été identifié au neveu chéri de Delacroix, l’élégant Charles de Verninac (1803-1834). On évoque plutôt aujourd’hui l’artiste anglais Newton Fielding (1799-1856), d’origine écossaise, ami de Delacroix comme son frère Thalès Fielding (1793-1837) qui travaillèrent avec Delacroix dans les années 1821-1826 aux techniques de l’estampe et de l’aquarelle dans lesquelles ils excellaient.

Un portrait de Charles de Verninac

Adolphe Moreau en 1875 puis Alfred Robaut en 1885, établissant le catalogue de l’œuvre de Delacroix, ont pensé que ce portrait délicat ne pouvait être que celui de Charles de Verninac, neveu très aimé du peintre et fils unique de sa sœur Henriette de Verninac. Mais, par la différence manifeste des traits du visage, ce dernier ne peut soutenir la confrontation avec les trois portraits de son jeune neveu peints par Delacroix vers 1819, 1826 et 1829, d’une incontestable ressemblance réciproque.

...ou de Newton Fielding ?

Aux débuts des années 1820 et dans l’anglomanie ambiante, Delacroix lia de fortes amitiés avec de jeunes artistes britanniques présents à Paris tels que les cinq frères Fielding, notamment « le bon » Thalès Fielding et son frère Newton.

Le béret à la Tam O’Shanter que porte le modèle du portrait pourrait être l’indice de l’identité de Newton Fielding, lequel était très fier de ses origines écossaises prétendument royales.

Par la finesse de sa facture et le charme qui émane de ce jeune personnage à la tenue pittoresque, ce portrait se rapproche aisément de ceux des élèves de la pension Goubaux (Portrait de Richard de la Hautière) peints par le peintre dans les années 1824 à 1830.

Une amitié fidèle

Newton resta à Paris pour contribuer aux publications illustrées de l’éditeur suisse Jean-François Ostervald. Il fut, en 1827, nommé maître de dessin des enfants du duc d’Orléans, futur Louis-Philippe. Il exposa au Salon, ainsi qu’au musée Colbert, se spécialisant, dans les aquarelles et les gouaches de sujets animaliers. Retourné en Grande-Bretagne au début des années 1830, il revint à Paris en 1855, très appauvri. Delacroix, par un geste généreux à son égard, lui prouva alors sa fidélité. Je ne peux vous dire combien je suis sensible à toutes les bontés de mes anciens amis , écrivit Newton Fielding au peintre le 29 novembre 1855 pour le remercier.

Bibliographie

  • Arlette Sérullaz, in Petit journal Exposition RMN, Œuvres restituées par l’Allemagne, musée d’Orsay, 1994, p. 7.
  • Barthélémy Jobert, Il y a terriblement à gagner dans la société de ce luron-là - Les amis britanniques de Delacroix au temps de sa jeunesse, in Bulletin de la Société des Amis du musée Eugène Delacroix, numéro 6, avril 2008, p. 10 - 20.
  • Musée du Louvre, Nouvelles acquisitions du Département des Peintures (1991-1995), Paris 1998, p. 294.